Il s’appelle Emile BRAGER. Il a 53 ans. Son look (naturel)
de voyageur lui donne une aura d’un autre temps. Il a des
faux airs de ces acteurs américains qui ont participé
à tous les westerns décrivant la Conquête
de l’Ouest. Il est aujourd’hui une référence
pour ce qui concerne le (vrai) voyage à cheval et on parle
de lui comme d’Anne MARIAGE ou Jean François BALLEREAU.
Il est fils d’agriculteurs (Cévennes) et, jusqu’à
7 ans, il côtoie la vie rude des montagnes « Quand
t’es pas en train de monter, t’es en train de descendre
». Le terrain est tellement pentu que les paysans
n’utilisent pas des charrettes mais des traîneaux
avec des patins en bois. Il se souvient d’avoir vu ses parents
travailler avec des bœufs et faire les marchés avec
un cheval attelé. C’est une petite ferme où
l’on ne gagne pas d’argent. C’est un pays et
une époque où l’on peut bien vivre mais à
l’ancienne, pas dans le nouvel esprit de marché qui
pointe son nez « j’ai vécu
au cul des vaches et des chevaux pendant toute ma jeunesse ».
C’est ainsi que toute la famille quitte la ferme et il part
de collèges en internats jusqu’à son bac qu’il
passe à l’âge de 17 ans «
Le cheval loisir coûte cher et le milieu est particulièrement
bourgeois. La ballade à cheval est proposée par
quelques clubs ou ranches autour de chez nous, mais je n’y
vais pas ».
Il passe par la formation d’un CREPS et décroche
son diplôme de professeur d’éducation physique.
Il attendra ses premiers salaires pour remonter à cheval
dans un centre équestre où il passe son premier
degré. Dans l’élan, il fait un stage dans
un club pour apprendre le métier
« j’ai fait plus de fumier que de monte à cheval.
Déjà, à l’époque, les centres
exploitaient les jeunes et il est regrettable qu’ils continuent
encore aujourd’hui ». Son métier de
prof de gym lui laisse du temps de libre. Il achète son
premier cheval « Gamin » qu’il garde pendant
2 ans « en fait, j’ai attendu
qu’il m’apprenne tous les rudiments de la monte et
de la relation homme / cheval ». Dès la fin
de cette aventure, il repart dans un centre équestre où
il monte classique. Il passe alors son second degré : «
j’ai fait le constat définitif que ce qui m’intéresse
c’est le cheval, la nature, le voyage et non le dressage
: le décorum me fait dégueuler ».
Il rencontre sa compagne avec qui, par la suite, il fera
les plus beaux voyages. Ils préparent leur premier grand
voyage qu’il appellera « par le chemin des écoliers
». C’est un voyage de 10 000 km, passant par la France,
l’Espagne et le Portugal «
nous sommes partis sans logistique, sans cheval de bât,
sans réchaud. Ce fut un peu dur ». Pour ce
voyage il achète des chevaux et il passe l’ATE (Accompagnateur
de Tourisme Equestre de l’ANTE).
De retour, il se tourne vers l’endurance et court à
Floirac. Il passe son brevet fédéral de Guide de
Tourisme Equestre (GTE). En 1981, il créé l’Association
des Cavaliers au Long Cours en compagnie des plus grands noms
du voyage à cheval : Stéphane BIGOT, Marie ROESLE,
Frédéric BLANC, Sylvie et Christian LILE.
La première partie de la vie active de cette association
se situe entre 1981 et 1984. Il y est très actif mais il
prépare une seconde aventure qui va l’en tenir éloigné
; ce voyage appelé « caravane pour un continent »
les amènera du Sud de l’Argentine jusqu’en
Alaska. Ils traverseront 15 pays pour un périple de 25
000 km. Ce périple dure 4 ans : «
c’est une concentration de sentiments, de sensations et
une recherche sur soi grâce aux relations, et la découverte
d’autres pays, d’autres cultures. Sylvie (sa compagne
et partenaire de voyage) m’étonne par son haut niveau
dans le cadre spécifique des voyages ».
En 1995, après avoir « régurgité
» leurs voyages grâce aux nombreuses conférences,
il écrit un ouvrage « techniques du voyage à
cheval » où il fait part de ses expériences
et de ses techniques sur le voyage. Il travaille sur un autre
projet technique : Etude sur l’effort et la capacité
d’adaptation des chevaux à partir de l’expérience
de « caravane sur un continent ». Ce projet n’aboutira
pas et ne sera pas publié.
En 1998 et 1999, ils partent aux Etats Unis pour une autre aventure
les « coureurs de prairie ». Un parcours de 10 000
km en 10 mois « on a appris la rigueur car il fallait impérativement
faire 40 km par jour or c’est une vraie gestion du temps
et de la fatigue. Ce n’est pas une randonnée cool.».
En leur absence, l’Association au Long Cours vivote. Il
la réactive dès leur retour.. Elle comprend environ
100 membres de tous les pays.
Le retour de voyage doit être réfléchi. On
ne revient pas comme ça de deux années de liberté.
Certains le vivent très mal : "Il
y a quatre éléments importants : travailler pour
être reconnu socialement et gagner de l’argent ; avoir
un logement car squatter chez les uns et les autres ne suffit
pas ; parler du voyage pour s’en débarrasser et en
faire le deuil ; se projeter, peut être, dans de nouveaux
projets de voyages ». En attendant
de nouvelles aventures équestres, il continue de travailler
dans l’éducation physique".